LES JOURNEES D'EMBATA A HASPARREN (23-28 Juillet)
Elgar, 1957ko azaroa
Les X-es journées de l'Association des Etudiants basques, "Embata", se sont déroulées, cette année, dans la charmante petite ville d'Hasparren, en Labourd. Il y a dix ans, c'est ici aussi qu'elles eurent lieu pour la première fois. Ici paysans et ouvriers se côtoient et s'entretiennent ensemble. Pas de distinction de classe sociale. Comme au temps de leurs ancêtres, les Haspandars d'aujourd'hui ont conservé leur fière allure. Ils semblent appartenir à une société très cultivée, tellement ils savent se comporter avec dignité, tellement ils parlent bien le basque. Ils le parlent avec noblesse, avec autant de distinction que les Saratars ou les Azkaindars, comme s'ils avaient conscience de posséder la plus belle des langues du monde. Ils en ont certainement conscience. Cependant je dois avouer avoir éprouvé une certaine inquiétude lors de mon court séjour parmi eux: les Haspandars sauront-ils transmettre à leurs enfants cette même légitime fierté, cette même conscience? En même temps qu'une bonne situation humaine, sauront-ils donner à leurs enfants l'amour des vraies valeurs basques, l'attachement à notre belle langue basque, expression vivante et originale de notre pensée? Car je me suis adressé à un petit Haspandar; il m'a répondu en français et m'a avoué bien timidement comprendre le basque mais être incapable comme tant d'autres de me répondre en notre langue maternelle. Les Haspandars sauront-ils?... Les Basques sauront-ils?...
Les différents sujets traités en ces journées par des spécialistes montrent bien tout l'intérêt que portent les Etudiants basques à l'avenir économique du Pays basque. M. Leizaola parla de l'"Avenir Economique du Pays basque". Il insista sur la nécessité de l'industrialisation de notre région et souligna le rôle que pouvait jouer "Embata", en tant qu'association. Il s'agit d'une action à réaliser dans le pays lui-même, en solidarité avec les Landais et Béarnais, selon les vues du plan français. D'où nécessité de faire appel à des techniciens pour former des cadres basques qui devront fonder et diriger des entreprises, à l'exemple de ce qui a été réalisé en Guipuzkoa et en Bizcaye.
M. l'Abbé Lafitte montra toute l'utilisation que pouvaient faire les Etudiants basques de la langue et des choses basques, soit en vue de présenter des thèses de doctorat, soit en vue d'entreprendre des études d'intérêt général ou particulier. Le champ d'investigations reste très vaste. Plus pratiquement, en ce qui concerne la langue parlée et écrite elle-même, il souligna le manque d'une équipe de rédacteurs laïcs. Des journaux existent: Herria, Gazte, Etchea, Elgar..., des revues: Eusko-Gogoa, Gure Herria, Egan.. Pour les maintenir attrayants et enrichissants, il faut des rédacteurs laïcs basques: les dirigeants (directeurs, maîtres, instituteurs et institutrices, de même que les religieueses qui enseignent dans nos écoles...) doivent donc se soucier de l'enseignement du basque et devraient normalement assurer cet enseignement. Il faut des lecteurs: un effort doit être réalisé en vue d'une propagande mieux organisée. Des éditions de livres basques existent en Labourd, en Guipuzkoa, en Amérique du Sud: un effort plus intense doit être entrepris pour répandre et faire lire les nombreux ouvrages publiés soit en basque, soit en français, soit en espagnol.
Le R.P. Gachiteguy nous parla avec beaucoup d'entrain et de dynamisme de l'avenir de l'agriculture au Pays basque. En bon sociologue, il commença par constater un fait: nous ne connaissons pas notre pays basque. A cette fin, il faudrait procéder à des enquêtes et monographies en des régions diverses qui nous permettraient de nous rendre compte du niveau de vie moyen des Basques. Peut-être aussi découvririons-nous les vrais problèmes, tels qu'ils se posent concrètement en notre région, comme par exemple: le problème de la modernisation de notre agriculture et du confort dans nos maisons d'habitation; le problème de la femme: n'est-ce pas un scandale de voir des femmes travailler aux durs travaux de la terre, presque au même rythme que l'homme en certaines périodes de l'année, surtout en été? Le problème de l'émigration: le basque qui émigre en Amérique demeure toujours en "marge de la société" où il lui est difficile, sinon impossible, de s'intégrer; le paysan qui émigre en ville s'adapte difficilement à non nouveau milieu de vie, car il est un déraciné. L'étudiant basque ne doit pas, ne peut pas en conscience se désintéresser de ces problèmes, car il est responsable de l'épanouissement humain et spirituel de ceux qui lui ont permis de quelque façon de pouvoir faire des études. Il est donc important de redonner confiance au paysan, qui n'est pas un "minus". Il appartient à la race des hommes au même titre que nous.
F.A.E.E.